While in London last month to promote my recently-published book on the fragile and threatened state of the Big Audit model, under which the four big international accounting networks provide audit services to the world's largest public companies, I had the pleasure of an extended discussion with Eric Albert, correspondent for the prominent French newspaper Le Monde, whose "Lettre de la City" appeared in the paper's edition for April 6 (below and here). Albert's lead requires translation, not only for vanity's sake, and his concluding paragraph captures the essential message of "Count Down":
"Quand les « Big Four » s’écrouleront"
Jim Peterson n’a pas franchement l’apparence d’un révolutionnaire. Nœud papillon, costume impeccable sur des souliers cirés, cheveux blancs tirés en arrière, l’Américain incarne parfaitement ce qu’il a longtemps été : un avocat d’affaires de haut vol, qui a très bien gagné sa vie en défendant les grands cabinets d’audit.
("Frankly, Jim Peterson does not have the appearance of a revolutionary. Bow tie, impeccable suit and shined shoes, white hair combed straight back, this American perfectly incarnates what he has always been: a high level business lawyer who has made a great life by defending the big audit firms.")
Derrière ses allures policées, son message est pourtant explosif.
Lui qui a longtemps été un homme du système, qui a connu de l’intérieur tous les rouages de la comptabilité des grandes multinationales, tire la sonnette d’alarme : les « Big Four », ces quatre grands cabinets d’audit internationaux (PwC, Deloitte, KPMG, Ernst & Young) risquent de s’effondrer à tout moment. « Ils sont plus fragiles qu’Arthur Andersen en 2002 », nous expliquait-il lors d’un récent passage à Londres, faisant référence à la faillite retentissante de l’ancien cabinet d’audit.
Urgence
Selon lui, l’urgence est réelle : « On ne peut pas survivre avec seulement trois auditeurs. Tout le système financier mondial se bloquerait si on arrivait à ça. » Pour tenter d’alerter l’opinion, il a récemment publié un livre ardu mais important sur le sujet (Count Down : The Past, Present and Uncertain Future of the Big Four Accounting Firms, Emerald Group Publishing, 2015).
Dans une première vie, Jim Peterson a longtemps enchaîné les emplois dans les grands cabinets d’audit. Son travail : les défendre à chaque fois que ceux-ci étaient attaqués en justice . Son dernier poste : avocat chez Arthur Andersen, justement. Sa chance a été d’atteindre l’âge de la retraite
en 2001, juste avant le scandale Enron.
Quelques mois plus tard, le géant américain de l’énergie s’écroulait, une vaste fraude comptable étant mise au jour. L’auditeur ? Arthur Andersen, qui s’était montré complice actif. Risquant les poursuites judiciaires, le cabinet a lui aussi fait faillite. « Il s’est écroulé en moins de deux semaines, rappelle Jim Peterson. Les associés situés à l’étranger ont été les premiers à partir , et tout le système a chuté derrière. »
Les scandales se succèdent
Cette faillite, qui a fait passer le monde du « Big Five » au « Big Four », a mis en évidence l’extrême fragilité financière des grands cabinets d’audit. Cela peut paraître paradoxal. En apparence, Deloitte, KPMG, PwC et Ernst & Young sont d’énormes réseaux internationaux, qui dominent le monde . Pratiquement aucune grande entreprise n’échappe à leurs tentacules : les quatre grands sont les seuls à savoir auditer des multinationales présentes dans des dizaines de pays, jonglant entre les paradis fiscaux et les lois du commerce international .
Pourtant, ils n’ont pratiquement aucune réserve financière. Ce sont des réseaux, sans holding centrale, qui appartiennent aux associés. Ironie du sort, les Big Four sont particulièrement peu transparents sur leurs propres comptes et il est très difficile de connaître leur état financier. Mais selon les calculs de Jim Peterson, il suffirait d’une soudaine perte de 1 milliard à 6 milliards de dollars, suivant les cas, pour provoquer une faillite : le genre de somme parfaitement réaliste par rapport aux énormes amendes ou aux poursuites judiciaires que subissent les banques depuis quelques années.
Or, les scandales comptables se succèdent avec la régularité d’un métronome. Les supermarchés Tesco ont révélé en 2014 avoir surestimé de plus de 300 millions d’euros leurs profits. Au Brésil , le scandale Petrobas pourrait bien avoir de sérieuses conséquences pour son auditeur, PwC (la Fondation Bill et Melinda Gates, actionnaire de Petrobas, le poursuit actuellement en justice). Et Deloitte a aussi eu très chaud en 2013, quand il a été poursuivi pour 7 milliards de dollars pour ne pas avoir vu venir la faillite de Taylor Bean, l’un des plus gros prêteurs immobiliers américains : un accord à l’amiable a finalement été passé.
Éviter la connivence
Mais après tout, pourquoi craindre une faillite de l’un des Big Four ? Contrairement aux grandes banques, leur survie n’est pas essentielle à la bonne conduite du système financier mondial. Faux, réplique Jim Peterson. Il rappelle que de plus en plus de pays obligent les entreprises à changer régulièrement d’auditeur, pour éviter la connivence.
Dans le même temps, les cabinets n’ont pas le droit de fournir des conseils aux entreprises qu’ils auditent, toujours pour la même raison. Résultat, avec seulement quatre grands cabinets, le choix est déjà extrêmement limité. « Récemment, une grande multinationale avait l’obligation de changer d’auditeur, pour respecter la loi. Elle avait donc le choix entre les trois concurrents : mais deux d’entre eux ont dû se retirer parce qu’ils lui fournissaient déjà des conseils », raconte Jim Peterson. Il n’en restait plus qu’un. « Si on arrive aux Big Three, beaucoup d’entreprises n’arriveront plus à trouver d’auditeur, alors que la loi les oblige en a avoir un. On risque de se trouver dans une situation complètement bloquée. »
Pour l’instant, à son grand désespoir, le sujet ne semble ne pas intéresser grand monde. Mais quand une crise éclatera, et que le système financier sera confronté au problème, le monde aura comme d’habitude réagi trop tard.
("At the moment, much to his chagrin, the subject does not seem of interest to many people. But when a crisis breaks out, and the financial system ends up facing this problem, the world will -- as usual -- have reacted too late.")
Thanks to Eric -- and to readers for joining this dialog. Please share with friends and colleagues. Comments are welcome, and subscription sign-up is easy and free, both at the Main page.